L'ode à la nature de Cécile Beau
Si la Mécanique des milieux continus, titre de la nouvelle exposition du Centre d’art Bastille, explore par la sémantique des notions scientifiques, le résultat plastique tend vers un lyrisme sans fard. Les œuvres de Cécile Beau envahissent ainsi l’espace avec finesse, sondant la fugacité de la nature et ses enjeux climatiques.
Le travail de Cécile Beau est à l’image des strates terrestres : découpé selon différents niveaux qui impliquent des milieux variés mais dont l’ensemble fait partie d’un tout connecté. Et c’est avec une poésie lunaire que l’artiste déploie son geste sensible au cœur même de la matière.
Au Centre d’art Bastille, sa Mécanique des milieux continus investit ainsi l’eau comme l’air, faisant des éléments des véhicules du vivant. À l’instar de la pièce Spécimen où deux aquariums se répondent en miroir, l’un renfermant un minéral, l’autre un végétal. Sorte de découverte figée, l’œuvre plonge un bonzaï et une pierre dans de l’eau, simulation d’une conservation dans du formole. Mais le liquide dans lequel les éléments sont capturés opère un mouvement lumineux et sonore par un système de micro éclairé. L’artiste donne alors à voir une nature saisie en mouvement.
Un étrange paradoxe insufflé également dans le triptyque Mécanique des milieux continus, dessin mural sur lequel sont esquissés la topographie terrestre et le déplacement de l’air. Des mouvements tectoniques représentés à l’échelle humaine impliquant donc un renversement d’échelle.
Microcosme en expansion
Dans cette déambulation de la nature, on accède à des sphères hors de notre quotidien, comme le voyage stratosphérique suggéré par Coriolis. Ce ballon sonde retenu par le plafond du Cab devient une antenne météorologique fictionnelle diffusant vent, pluie et givre à travers une radio qui lui est rattachée. Image d’un satellite lunaire qui éclaire le terrestre, émergeant parfois du néant.
Au creux des murs caverneux avoisinants évolue un microcosme verdoyant. Pour Cladonia, l’artiste a recréé un univers utopique dans lequel quatre types de mousses profilèrent, retour originel à la formation de la Terre. Une formation plus concentrée dans la dernière salle où l’Albédo 0.60 forme un trou noir énigmatique. Au centre d’un disque sombre se cristallise ainsi de l’eau au fil des jours pour former une glace témoin des bouleversements climatiques.
Nébuleux champignons
Présentée en "project room", espace dédié à un invité à chaque exposition, Anouck Durand-Gasselin présente également des œuvres évolutives, mais selon des phénomènes presque imperceptibles. L’artiste révèle la sporulation des champignons sur des plaques présentées tels des tableaux ou par le biais d’un projecteur.
Avec Boletus, elle nous fait ainsi pénétrer dans un univers microcosmique où la matière organique devient mystère scientifique et visuel, pour remettre en cause l’histoire de la photographie.
Mécanique des milieux continus, au Centre d’Art Bastille jusqu’au dimanche 19 mars