Pump the world
Le titre De part et d’autre n’est pas que la transcription de la genèse de l’exposition qui se déploie entre le Vog et l’Espace Vallès, c’est également l’évocation du sens des œuvres, naviguant entre l’universel et l’individuel, à travers l’espace et au cœur de New York, la « capitale du monde » selon Samuel Rousseau. La ville a inspiré nombre de créations vidéo à l’artiste qui ne se contente pas de dresser un kaléidoscope de l’architecture américaine mais qui déroule une mise en abyme troublante du réel au moyen d’une technologie numérique sublimée.
Un voyage entre virtualité et réalité tangible qui débute au Vog. Dans ce premier volet, plusieurs tableaux animés sont présentés, dont la série Urban Totem (2012, photo) dans laquelle la confrontation entre l’humain et l’urbain commence à se dessiner. Au centre de caissons lumineux, qui se présentent comme des toiles, des constructions symétriques faites de fioles laissent évaporer ou jaillir une substance colorée. Une danse hypnotique de flux qui capte le regard, mais derrière ce ballet rayonnant une question persiste : est-ce de la pollution ou une potion ? Un remède pour l’homme ou contre lui ? C’est là toute la prégnance de l’œuvre : une maîtrise plastique qui sert un art en plein questionnement. L’artiste ne nous donne pas de réponse, mais des clés pour s’interroger.
Tout comme avec la série Chemical (2009-2013) où de petits personnages marchent sans cesse dans des cachets éclairés. L’interprétation est libre : pilule énergisante ou addiction à la médicamentation. Pour Samuel Rousseau, il s’agit avant tout d'une création intime qui narre sa vie, mais finalement le constat est le même : la société offre des univers attirants comme destructeurs, au même titre que la ville. New York, sorte de rêve américain, s’avère être une ville qui pompe toute l’énergie humaine qui s’y trouve et l’écrase. Une vision remarquablement mise en scène avec la vidéo Brave Old New World (2012) projetée sur un relief. Les buildings descendent puis remontent dans une valse incessante qui devient immersive.
Une première plongée dans la frénésie urbaine qui s’avère totale à l’Espace Vallès. Le fait que l’œuvre Trafik 2.2 (2013) est été réalisée in situ contribue largement à noyer le visiteur dans la folie du métro new-yorkais. Des palettes tracent un chemin, sur lesquelles sont projetées des vues du trafic quotidien au pied de ce qu’était le Wall Trade Center. Sur les strates de bois, le corps se greffe à ceux de passants pressés et l’impression d’être emporté est perceptible. Au-dessus, la Terre règne, projection vidéo déformée et triturée dans tous les sens. Si l’homme est aspiré par la rue, la planète elle cherche à l’expulser. La véritable nature de la ville est dévoilée : pompe humaine, elle-même engendrée par l’homme.
De part et d’autre, jusqu’au 21 décembre, au Vog (Fontaine) et à l’Espace Vallès (Saint-Martin-d'Hères)