Créatures précoces
Plongées dans un espace-temps indéfini, enveloppées dans la pénombre, deux silhouettes se dessinent sur scène, accompagnée par une voix off et une lumière diffuse qui envahit peu à peu le plateau. Esther Gottman, interprétée par Anne-Shlomit Deonna, a «uploadé» son esprit dans un serveur, tandis que certains humains, en partie interprétés par Roberto Molo, tentent de lutter contre cette virtualisation de l'homme. Créature(s), la dernière création de la compagnie Les Moteurs Multiples, fait sienne les codes de la science-fiction avec un minimalisme inhabituel. Un écart de genre qui permet à ses auteurs d'aborder simplement cette épineuse question de l'individu qui s'informatise dans une société encline à basculer irrémédiablement dans l'ère du réseau. Récurrent ces dernières années, ce discours trouve une nouvelle portée avec cette fable virtuelle où, par le biais de mots inventés, les deux acteurs semblent s'adresser directement à la génération Y.
Paradoxalement, le choix de réinterpréter les bases du théâtre grec à la lampe torche et avec seulement deux comédiens pour l'ensemble des rôles rend toutefois complexe l'identification du personnage en action et laborieux le démêlement de la trame. Si ces problématiques qui nous dépassent sont d'actualité, elles devraient donc cependant rester compliquées à assimiler pour des non initiés, tant la forme de Créature(s) déroute autant qu'elle charme.
Créature(s), au Théâtre Les Ateliers du mardi 24 au vendredi 27 février